Le pemphigus foliacé félin : Partie 2 : Diagnostic et Traitements actuels

Share DermaVet Insights ;-)

Le diagnostic du pemphigus foliacé félin repose sur une approche globale combinant l’évaluation clinique, la cytologie et l’histopathologie. L’examen clinique recherche des pustules, érosions et croûtes, typiquement distribuées de façon symétrique sur le visage et les pattes. La cytologie, via la préparation de Tzanck, révèle des neutrophiles et des kératinocytes acantholytiques caractéristiques. L’histopathologie, pierre angulaire du diagnostic, montre des pustules intra-épidermiques contenant des neutrophiles et des cellules acantholytiques

Diagnostic

Le diagnostic du pemphigus foliacé félin repose sur une approche multifacette, combinant l’évaluation clinique, l’analyse cytologique et l’examen histopathologique. Cette approche globale est essentielle pour établir un diagnostic précis et différencier le PF d’autres affections cutanées qui peuvent présenter des signes cliniques similaires.

Le premier critère diagnostique est l’observation clinique. Les vétérinaires doivent être attentifs à la présence de pustules, qui sont les lésions primaires caractéristiques du PF. Cependant, comme mentionné précédemment, ces pustules sont souvent transitoires et peuvent évoluer rapidement vers des érosions superficielles et des croûtes. La distribution des lésions est également un élément clé de l’évaluation clinique. Une implication prédominante du visage et des pattes, avec une distribution bilatérale symétrique, est fortement évocatrice du PF félin.

Le deuxième critère diagnostique majeur est l’examen histopathologique. Cet examen révèle la présence de pustules épidermiques ou folliculaires superficielles contenant des neutrophiles et des kératinocytes acantholytiques. Ces derniers sont la signature histologique du PF et leur identification est cruciale pour le diagnostic définitif.

Le troisième critère, tout aussi important, est l’exclusion d’autres troubles pustuleux neutrophiliques acantholytiques. En particulier, la pyodermite staphylococcique associée à l’exfoliation et la dermatophytose pustuleuse doivent être écartées, car elles peuvent présenter des caractéristiques cliniques et histologiques similaires au PF.

Cytologie

La cytologie joue un rôle crucial dans le processus diagnostique initial du PF félin. La technique de choix est la préparation de Tzanck, qui permet une évaluation rapide et relativement peu invasive des lésions cutanées. Pour réaliser cette préparation, le vétérinaire sélectionne soigneusement une pustule intacte. Avec précaution, il rompt la pustule à l’aide d’une aiguille de petit calibre, puis étale délicatement son contenu sur une lame de microscope.

L’examen microscopique d’un échantillon provenant d’un chat atteint de PF révèle typiquement une image caractéristique. On observe de nombreux neutrophiles non dégénérés, ce qui indique un processus inflammatoire stérile plutôt qu’une infection bactérienne. Cependant, l’élément le plus distinctif et diagnostique est la présence de kératinocytes acantholytiques. Ces cellules sont des kératinocytes immatures qui ont perdu leur adhésion normale aux cellules environnantes. Elles se distinguent par leur forme arrondie et leur taille importante, généralement quatre fois supérieure ou plus à celle d’un neutrophile.

Les kératinocytes acantholytiques présentent des caractéristiques cytologiques spécifiques. Leur cytoplasme est souvent abondant et intensément coloré, reflétant leur origine dans les couches plus profondes de l’épiderme. Le noyau de ces cellules est généralement intact et peut varier en taille, mais il reste généralement bien défini. La présence de ces cellules en nombre significatif, associée à une inflammation neutrophilique, est fortement évocatrice du PF félin.

Il est important de noter que la qualité et la représentativité de l’échantillon cytologique dépendent grandement de la technique de prélèvement. Une pustule intacte fournira généralement l’échantillon le plus informatif. Cependant, dans de nombreux cas, les pustules peuvent être rares ou déjà rompues au moment de l’examen. Dans ces situations, le vétérinaire peut tenter de prélever du matériel sous les croûtes récentes, bien que ces échantillons puissent être moins riches en cellules diagnostiques.

Histopathologie

L’histopathologie reste la pierre angulaire du diagnostic définitif du PF félin. Elle permet non seulement de confirmer le diagnostic, mais aussi d’exclure d’autres affections cutanées qui peuvent présenter des caractéristiques cliniques similaires. Pour obtenir les meilleurs résultats, il est crucial de sélectionner soigneusement les lésions à biopsier. Idéalement, les biopsies doivent être prélevées sur des pustules intactes ou des lésions récentes, car elles sont les plus susceptibles de présenter les caractéristiques histologiques typiques du PF.

L’examen histopathologique d’un échantillon de PF félin révèle plusieurs caractéristiques distinctives :

Premièrement, l’épiderme présente généralement une hyperplasie, qui peut varier de légère à sévère. Cette hyperplasie est principalement due à une acanthose, c’est-à-dire un épaississement de la couche épineuse de l’épiderme. Cette réaction épidermique reflète la réponse de la peau à l’inflammation chronique et à la perte continue de kératinocytes due au processus acantholytique.

Deuxièmement, on observe fréquemment une hyperkératose, qui est principalement de type orthokératosique. Cela signifie que la couche cornée de l’épiderme est épaissie, mais les cellules conservent leurs noyaux. Dans certains cas, on peut également observer des zones focales de parakératose, où les cellules de la couche cornée conservent leurs noyaux de manière anormale.

Le derme sous-jacent présente généralement un infiltrat inflammatoire, qui peut varier de léger à sévère. Cet infiltrat est typiquement décrit comme péri-vasculaire à interstitiel, ce qui signifie qu’il se concentre autour des vaisseaux sanguins mais peut aussi s’étendre dans le tissu conjonctif environnant.

La caractéristique histologique la plus diagnostique du PF est la présence de pustules intra-épidermiques. Ces pustules contiennent principalement des neutrophiles, bien que des éosinophiles puissent également être présents dans certains cas. Au sein de ces pustules, on observe la présence de cellules acantholytiques, qui sont la signature histologique du PF. Ces cellules acantholytiques sont souvent regroupées en “radeaux”, formant des amas caractéristiques au sein de la pustule.

Un élément intéressant à noter est la présence fréquente de mastocytes dans les échantillons histologiques de PF félin. Dans une grande étude rétrospective, 94% des échantillons présentaient des mastocytes, et dans 20% des cas, ils étaient même le type cellulaire prédominant. Cette observation soulève des questions intéressantes sur le rôle potentiel des mastocytes dans la pathogenèse du PF félin, bien que leur signification exacte reste à élucider.

Il est important de souligner que l’interprétation des résultats histopathologiques doit toujours être effectuée en conjonction avec les observations cliniques et les résultats des autres tests diagnostiques. Dans certains cas, en particulier lorsque les lésions sont chroniques ou ont été altérées par des traitements antérieurs, les caractéristiques histologiques peuvent être moins évidentes ou atypiques. Dans ces situations, des biopsies répétées ou l’utilisation de techniques complémentaires, comme l’immunofluorescence directe, peuvent être nécessaires pour confirmer le diagnostic.

SI VOUS ETES VETERINAIRE : Pour lire la suite de cet article, veuillez vous enregistrer en haut à droite. Merci

Pronostic et suivi

Le pronostic du pemphigus foliacé félin est généralement favorable avec un traitement approprié, mais il est important de noter que la maladie nécessite souvent un traitement à long terme, voire à vie dans certains cas. La réponse au traitement peut varier considérablement d’un individu à l’autre, et une gestion attentive est nécessaire pour optimiser les résultats thérapeutiques tout en minimisant les effets secondaires potentiels.

La décision de réduire progressivement la médication une fois la rémission obtenue est souvent délicate et nécessite une collaboration étroite entre le vétérinaire et le propriétaire. Cette phase de réduction progressive est cruciale car elle vise à trouver la dose minimale efficace qui maintient la rémission tout en réduisant le risque d’effets secondaires à long terme.

Il est crucial de souligner que ce protocole n’est qu’un guide général et doit être adapté à chaque patient individuel. Certains chats peuvent nécessiter des réductions plus lentes ou des doses d’entretien plus élevées, tandis que d’autres peuvent tolérer des réductions plus rapides. La clé du succès réside dans une surveillance étroite et une communication régulière entre le vétérinaire et le propriétaire.

Le suivi régulier est un aspect essentiel de la gestion à long terme du PF félin. Ces contrôles permettent d’évaluer la réponse au traitement, de détecter précocement toute rechute et de surveiller l’apparition d’éventuels effets secondaires. Lors de ces visites, le vétérinaire effectuera généralement un examen physique complet, en accordant une attention particulière à l’état de la peau et du pelage. Des examens complémentaires, tels que des analyses sanguines, peuvent être recommandés périodiquement pour surveiller les effets systémiques du traitement immunosuppresseur.

Il est également important d’éduquer les propriétaires sur les signes de rechute à surveiller. Ceux-ci peuvent inclure la réapparition de croûtes, d’érosions ou de zones d’alopécie, ainsi que des signes de prurit accru. Une détection précoce des rechutes peut permettre une intervention rapide et éviter la nécessité de revenir à des doses élevées de médicaments.

La gestion des effets secondaires potentiels est un autre aspect crucial du suivi à long terme. Les propriétaires doivent être informés des effets secondaires possibles des médicaments utilisés et encouragés à signaler tout changement notable dans le comportement ou l’état de santé de leur chat. Pour les chats sous corticostéroïdes à long terme, une surveillance régulière de la glycémie peut être recommandée pour détecter précocement le développement d’un diabète sucré induit par les stéroïdes.

Dans certains cas, des thérapies complémentaires peuvent être envisagées pour soutenir le traitement principal et améliorer la qualité de vie du patient. Par exemple, des soins topiques doux peuvent aider à soulager l’inconfort et favoriser la guérison des lésions cutanées. Des suppléments nutritionnels, tels que des acides gras oméga-3, peuvent être bénéfiques pour soutenir la santé de la peau et du pelage.

Il est important de noter que même avec un traitement optimal, certains chats peuvent connaître des périodes de rechute. Ces épisodes ne doivent pas être considérés comme des échecs thérapeutiques, mais plutôt comme des défis à relever dans le cadre d’une gestion à long terme de la maladie. Dans ces situations, une réévaluation du plan de traitement peut être nécessaire, ce qui peut impliquer une augmentation temporaire des doses de médicaments ou l’ajout d’agents thérapeutiques supplémentaires.

La durée du traitement peut varier considérablement d’un patient à l’autre. Certains chats peuvent nécessiter un traitement à vie, tandis que d’autres peuvent éventuellement être sevrés complètement de leur médication. La décision d’arrêter le traitement doit être prise avec beaucoup de précaution et uniquement après une période prolongée de rémission stable.

Conclusion

Le pemphigus foliacé félin représente un défi significatif dans le domaine de la dermatologie vétérinaire, nécessitant une approche diagnostique rigoureuse et une gestion thérapeutique minutieuse. La compréhension approfondie de sa pathogenèse, de ses manifestations cliniques et des options de traitement disponibles est cruciale pour offrir les meilleurs soins possibles aux chats affectés.

L’évolution des connaissances sur le métabolisme félin des corticostéroïdes et l’introduction de nouveaux agents thérapeutiques comme la cyclosporine ont considérablement amélioré notre capacité à gérer efficacement cette maladie. Cependant, chaque cas de PF félin reste unique et nécessite une approche individualisée, tenant compte des particularités de chaque patient et des préférences de son propriétaire.

Le diagnostic précoce et précis, suivi d’un traitement approprié, peut permettre à de nombreux chats atteints de PF de bénéficier d’une bonne qualité de vie à long terme. La clé du succès réside dans une collaboration étroite entre le vétérinaire et le propriétaire, avec un suivi régulier et une adaptation continue du plan de traitement en fonction de la réponse du patient.

Bien que des progrès significatifs aient été réalisés dans la compréhension et le traitement du PF félin, de nombreuses questions restent sans réponse. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour élucider pleinement les mécanismes sous-jacents de la maladie, identifier de nouvelles cibles thérapeutiques potentielles et développer des stratégies de traitement encore plus efficaces et mieux tolérées.

En fin de compte, la gestion réussie du pemphigus foliacé félin repose sur une approche holistique, combinant une thérapie médicale optimisée, un suivi attentif et des soins de soutien appropriés. Avec une prise en charge adéquate, de nombreux chats atteints de PF peuvent mener une vie confortable et épanouie, témoignant des progrès remarquables réalisés dans ce domaine de la médecine vétérinaire.

Bibliographie

Anderson, JG; Bizikova, P; Linder, KE | Erosive and ulcerative stomatitis in dogs and cats: which immune-mediated diseases to consider? | J Am Vet Med Assoc. 2023 Apr 17;261(S1):S48-S57. doi: 10.2460/javma.22.12.0573. PMID: 37059419

Barrs, VR; Beatty, JA; Hobi, S; Sandy, JR | Successful management of feline pemphigus foliaceus with pentoxifylline and topical hydrocortisone aceponate. | Vet Med Sci. 2022 May;8(3):937-944. doi: 10.1002/vms3.768. PMID: 35212177

Bizikova, P; Burrows, A | Feline pemphigus foliaceus: original case series and a comprehensive literature review. | BMC Vet Res. 2019 Jan 9;15(1):22. doi: 10.1186/s12917-018-1739-y. PMID: 30626385

Bizikova, P; Levy, BJ; Mamo, LB | Detection of circulating anti-keratinocyte autoantibodies in feline pemphigus foliaceus. | Vet Dermatol. 2020 Oct;31(5):378-e100. doi: 10.1111/vde.12861. PMID: 32372490

Bizikova, P; Mendoza-Kuznetsova, E; Piedra-Mora, C | Comorbidity of ectopic thymoma-associated exfoliative dermatitis and pemphigus foliaceus in a cat. | Can Vet J. 2021 Oct;62(10):1067-1070. PMID: 34602633

Izydorczyk, V; Pye, C | Pemphigus foliaceus in cats. | Can Vet J. 2024 Mar;65(3):297-300. PMID: 38434171

Jordan, TJM; Affolter, VK; Outerbridge, CA; Goodale, EC; White, SD | Clinicopathological findings and clinical outcomes in 49 cases of feline pemphigus foliaceus examined in Northern California, USA (1987-2017). | Vet Dermatol. 2019 Jun;30(3):209-e65. doi: 10.1111/vde.12731. PMID: 30779233

Linder, KE; Olivry, T; Tham, HL | Deep pemphigus (pemphigus vulgaris, pemphigus vegetans and paraneoplastic pemphigus) in dogs, cats and horses: a comprehensive review. | BMC Vet Res. 2020 Nov 23;16(1):457. doi: 10.1186/s12917-020-02677-w. PMID: 33228633

 

Recherches Connexes

pemphigus foliacé chat, maladie auto immune, auto immune, foliacé chez le chat, pemphigus foliacé chez, auto anticorps, chez le chat, chien, système immunitaire, niveau, chatte, chanfrein, animaux, dermatoses, menton, onyxis, formation, vésicules, démodécie, muqueuses, vis, dai, constituants, consultation, chow chow, chiens, espèces, diagnostic différentiel, plupart, examen clinique, cours, chez le chien, polynucléaires neutrophiles, biopsie, groupe, sensibilité, contact, composants, photos, pavillons, prédisposition, desmogléines, membrane, famille, granulocytes neutrophiles, âge, oreilles, cheval, dermatose, pemphigus foliacé chat, maladie auto immune, auto immune, pemphigus, chat, dermatose, foliacé chez le chat, pemphigus foliacé chez, auto anticorps, pemphigus foliacé, chez le chat, chien, pf, cas, prise en charge, croûtes, peau, niveau, cheval, chanfrein, système immunitaire, chatte, lésions, maladie, bien être, oreilles, pattes, propriétaires, âge, félin, menton, onyxis, forme, problèmes, aspect, zones, dai, vis, effets secondaires, constituants, animaux, mécanismes, consultation, chow chow, kératinocytes, diagnostic, traitement, présence, espèces, signes cliniques, polynucléaires neutrophiles, contact, cloques, anamnèse, composants, groupe, famille, desmogléines, membrane, examen clinique, protéines, affection, museau, qualité, options, cellules, symptômes, évolution, antécédents, démangeaisons, pustules

Share DermaVet Insights ;-)

Leave a Comment

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Scroll to Top